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La commune actuelle rassemble plusieurs anciennes communes et communautés médiévales. C’est d’abord Lagremuse qui est rattaché au Chaffaut en 1867, puis Saint-Jurson en 1962 et Espinouse en 1973. Si Le Chaffaut, Lagremuse et Saint-Jurson étaient, sous l’Ancien Régime, dans le diocèse de Digne, Espinouse faisait partie de celui de Riez. D’autre part, à partir de la Révolution, Le Chaffaut et Lagremuse font partie de l’arrondissement de Digne, tandis que Saint-Jurson et Espinouse sont dans le canton de Mezel.

LE CHAFFAUT

Le lieu apparaît à la fin du XIe siècle, entre 1064 et 1079 in Katafulcho (Atlas, p. 170). Il est ensuite cité par les Pouillés du diocèse de Digne en 1351 (p. 257) avec un cappellanus de Cadafalco qui possède un revenu de 11 livres tandis que la prébende s’élève à 20 livres. Cette prébende revenait à cette époque au sacristain de Digne. Emile Isnard (p. 297-298) cite un texte de 1320 où celui-ci perçoit annuellement la dîme du Chaffaut, decima Cadafalci. Le chapelain est encore cité en 1376 (p. 256). On ne connaît la titulature de l’église paroissiale que lors de la visite de l’évêque de Digne le 31 octobre 1683, saint Barthélemy, mais sans être assuré s’il s’agit du titulaire originel (1). Elle est citée accompagnée du cimetière. Une seule visite pastorale du 28 mars 1860 signale deux chapelles rurales en mauvais état. Il n’en plus fait mention par la suite, sans doute à cause de leur complet abandon et ruine. Deux indices cependant peuvent nous mettre sur la voie. C’est d’abord un oratoire de St Pierre indiqué par les cartes IGN modernes à 1 km au sud du Chaffaut, ainsi qu’un moulin dit de St Pierre situé à 600 m au SE du village. Ce saint Pierre pourrait être le premier titulaire de la paroisse. Un autre lieu-dit, St Antoine, au Plan du Chaffaut pourrait évoquer également un ancien lieu de culte. L’évêque de Digne en 1683, la carte de Cassini et l’abbé Féraud ne font aucune mention d’un édifice quelconque.

SAINT-JURSON

Au moment d’être rattaché au Chaffaut en 1962, Saint-Jurson ne comptait plus que 9 habitants. C’est durant le XIVe siècle que la population fut la plus importante, 15 feux en 1315, soit 75 habitants. En 1471, le territoire est déclaré inhabité. En 1765, il compte 46 habitants et 62 en 1851 (Atlas, p. 196). Il faut reconnaître que la commune ne comprenait que 353 hectares  et ne pouvait accueillir un plus grand nombre d’habitants. Elle est située à l’est de celle du Chaffaut en limite avec la commune de Digne et de Gaubert..

98. Le prieuré-cure Saint-Georges de Sargan

Saint-Jurson tire directement son nom de saint Georges, comme la commune de Saint-Jurs dans le canton de Moustiers. Il apparaît à la fin du XIIe siècle, en 1171, dans une bulle du pape Alexandre III invitant l’évêque de Digne à réprimer les vexations dirigées par Guy de Gaubert contre les habitants de Saint-Georges. Une autre bulle du pape Honorius III datée du 4 janvier 1225 réitère cette recommandation. Ces deux bulles sont reproduites dans le tome 2 du cartulaire de Lérins. En 1259, nous avons la confirmation de cette appartenance à Lérins, par le pape Alexandre IV, in diocesi Diniensi, castrum Sancti Georgii et ecclesiam ejusdem castri, cum omnibus pertinentiis suis. C’est le seul prieuré appartenant à cette abbaye qui est situé dans le diocèse de Digne d’alors (2). L’église est d’ailleurs tenue par un prieur comme l’atteste les Pouillés de Digne en 1351 et 1376, prior Sancti Georgii. C’est lors de l’enquête de 1252 que nous apprenons que le castrum de Saint-Georges est dit de Sargan, castrum de San Jurs de Sarganio. Le seigneur en est Guillaume le Gros de Galbert, seigneur de Galbert, Saint-Jurson, Moriez et Méailles, de la même famille que celui rencontré en 1171 et 1225 (Enquêtes n° 497 et note 3, p. 346). Selon Abbayes et Prieurés le prieuré de Saint-Jurson est uni en 1407 à celui de Clumanc dans le diocèse de Senez. C’est ce qui a entraîné une erreur de localisation. C’est ainsi que dans le CL 2, p. 6, Saint-Jurson figure dans le diocèse de Digne, mais page cv, il est recensé dans le diocèse de Senez, erreur répétée par Atlas (p. 196).

L’église paroissiale est bien entendu sous la titulature de saint Georges. Lors de sa visite pastorale en 1683 Mgr Le Tellier reconnaît que le prieuré de Saint-Jurson est desservi par un prêtre du diocèse de Riez et que son église est dédiée à  Saint-George de Sergon (3). L’abbé Féraud (p. 105) rappelle qu’elle était anciennement un prieuré-cure desservi par un curé, dont les moines de l’abbaye de Lérins, étaient les collateurs. L’église n’était pas située dans le hameau de Saint-Jurson, mais à 1250 m au NE. La carte IGN signale St Georges chapelle ruinée et la carte de Cassini, au même endroit une chapelle en état dite St Georges. L’enquête sur les lieux de culte de 1899 nous délivre la dernière information : dans la petite commune de St Jurson une vieille église aujourd’hui en ruine (1880) a été remplacée par une chapelle autorisée par le seul usage depuis 1810. La Ste messe y est célébrée le 23 avril et le dimanche suivant de chaque année. On y fait en outre les baptêmes, les mariages, les relevailles, les enterrements pour les habitants de la commune. La première église Saint-Georges a ainsi été remplacée par une nouvelle dans le hameau en 1810 et elle est reconnue en ruine en 1880.

LAGREMUSE

Malgré ses 1745 hectares, la population n’a jamais pu dépasser les 270 habitants. En 1471, après les guerres et les épidémies, le territoire est dépeuplé. Féraud (p. 53) recense seulement cinq maisons de campagne composant 66 âmes, il n’y a pas de hameaux. En 1867, la commune est rattachée à celle du Chaffaut.

99. L’ancienne église castrale et la chapelle rurale

Les Pouillés de Digne en 1351, comme pour Le Chaffaut, recensent un cappellanus de Lagramusa et la prebenda de Lagramusa. Cette dernière devait revenir au sacristain de la cathédrale de Digne, car Lagremuse  est associé au Chaffaut. En 1376, c’est le même chapelain qui dessert les deux paroisses. Mais Lagremuse est néanmoins un castrum comme indiqué lors de l’enquête de 1252 : castrum de Lagremusa (n° 542, p. 354). Féraud (p. 53) date le château du XVe siècle et il est remarquable par sa position sur trois rochers qui dominent toute la vallée. On ne connaît l’église paroissiale que lors de la même visite pastorale de 1683 où l’évêque y recense un tableau avec saint Michel, titulaire et sainte Agathe, patronne. Comme bien souvent, c’est le patron qui va détrôner le titulaire. En effet, par la suite c’est sainte Agathe qui devient la titulaire de l’église. C’est ce que confirment l’abbé Féraud et les visites pastorales du XIXe siècle. Féraud ajoute même que cette église n’était au départ qu’une chapelle castrale contigüe au château, devenue par la suite paroissiale. Elle est mentionnée lors des visites pastorales du XIXe siècle, une chapelle au château en 1866. Mais une autre chapelle est signalée, d’abord en 1860, une chapelle rurale dégradée et non fermée. Sa ruine est imminente car en 1872, il n’y a pas de chapelle rurale. Il est probable qu’il s’agit de la Chapelle de Lagremuse signalée par une croix par la carte IGN moderne à 150 m au SE du village ruiné de Lagremuse.

Synthèse

Le prieuré Saint-Georges de Sargan occupe un emplacement désertique, isolé, loin de toute habitation. Quand il apparaît en 1171, il existe déjà et ne fait pas partie d’un castrum ; c’est seulement un prieuré, mais dont l’église dessert les habitants. Cette position permet de le classer parmi les premières paroisses créées au XIe siècle, bien souvent par des moines, ici ceux de Lérins.


(1) ADAHP 1 G 5, f° 71 r°-73 v°, visite pastorale du Chaffaut de 1683.

(2) CL II, n° CII, p. 167-168 et CIII, p. 169 pour 1171 et 1225. CL II, n° IV, p. 6 pour 1259.

(3) Visite du 1e octobre 1683, ADAHP, 1 G 5.

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