archeoprovence

Faisait partie du diocèse de Gap et de la viguerie de Digne, aujourd’hui dans le canton de Digne Ouest. Cette commune de 1822 hectares occupe la rive droite de la Bléone entre les communes de Malijai à l’ouest et de Mallemoisson et du torrent des Duyes à l’est. Elle est longée au sud par la N 85 qui suit en gros le tracé de la voie antique Sisteron/Digne, qualifiée de strata publica en 1335. Provenant des Alpes-Maritimes, elle est rejointe à Mirabeau par une autre venant de Riez. De nombreux sites archéologiques ont été recensés sur la commune, situés soit au bord de la voie, soit aux abords du ravin de Barrabine qui traverse en partie la commune du nord au sud (CAG, n° 122, p. 295-297). La commune n’a jamais connu une forte population, 360 habitants en 1315, 180 en 1471, 521 en 1851 qui fut le maximum atteint. Elle a incorporé au XVe siècle la communauté de Beauvezer qui comptait 60 habitants en 1315 mais qui fut décimée par la peste (Atlas, p. 184). L’habitat a été longtemps dispersé en petits hameaux avant que le village de Mirabeau ne se forme. Celui-ci s’est développé à partir du hameau du Riou au cours du XVIIIe siècle. L’abbé Féraud dénombre pas moins de quatorze hameaux au XIXe siècle répartis sur tout le territoire. C’est pourquoi les lieux de culte sont également dispersés dans toute la commune.

268. Saint-Christophe, prieuré de Saint-Victor sur un site antique

Aujourd’hui ce n’est qu’une simple chapelle avec son cimetière dans un champ au bord de la N 85, côtoyant le Ravin de St Christol.  A quelques 600 mètres de la commune de Malijai, elle est dominée par une colline où s’élevait le castrum de Belvezer cité en 1252 en même temps que celui de Mirabellum (Enquêtes, n° 544 et 534, p. 352 et 354). Le site a livré de chaque côté du ravin de nombreux éléments archéologiques faisant penser à un vaste établissement gallo-romain ayant pu servir également de relais sur la route menant à Sisteron. La chapelle apparaît comme une possession de l’abbaye de Saint-Victor lors de trois confirmations données par les papes aux XIe et XIIe siècles, in episcopatu Vapicensis cellam sancti Christofori ad Estradas ou de Stradis (1). Le prieuré est encore cité en 1337, prioratus Sancti Christofori (n° 1131, p. 619). Il réapparaît à la sortie des guerres de Religion lors des visites pastorales de l’évêque de Gap, d’abord en 1602 où à Beauvezer, chapelle Saint-Christophe sur le grand chemin. Puis le 4 août 1612, à Beauvezer, l’église Saint-Christol toute ouverte, le toit rompu (ADHA G 780-781). De par sa proximité avec Malijai, elle va faire partie de la paroisse de cette commune et est citée lors des visites pastorales de l’évêque de Digne. Ainsi en 1860, la chapelle rurale de Beauvezer est passable. L’enquête de 1899 reconnaît une chapelle au quartier de Beauvezer dans le cimetière de ce lieu, vieille de plusieurs siècles. Messe le jour de l’Ascension, appartient à la commune de Mirabeau (2 V 73, n° 183).

La chapelle comporte une nef sans travée se terminant par une abside en hémicycle et une voûte en cul-de-four orientée vers l’est. L’appareil est formé de galets noyés dans le mortier. C’est celui de l’abside, à l’extérieur, qui présente par endroits des galets choisis pour former des lits horizontaux. R. Collier estime que la chapelle peut au moins partiellement remonter au XIe siècle (p. 141). C’est aussi l’avis d’Alpes Romanes qui la date de la même époque, malgré son apparence banale et sa maçonnerie rustique (p. 54). En plein champ, en milieu ouvert, sur un site antique important et au bord d’une voie vitale pour le commerce et les voyageurs, la chapelle a perpétué le rôle de la station romaine dont le site a dû être christianisé dès l’origine.

269. Saint-Philippe à Ville Vieille

C’est l’une des églises qui fut paroissiale mais seulement pour un hameau dénommé la Colle et quelques fermes environnantes. Elle est située au SO du village de Mirabeau sur la Cime des Usclats culminant à 814 mètres d’altitude. La chapelle est placée juste en-dessous sur un petit plateau, à l’aplomb des pentes. Sur le flanc nord de la montagne ont été remarqué des tas d’épierrements contenant des fragments de tegulae. La carte de Cassini indique un édifice ruiné dit St Philippe accompagné du toponyme Ville Vieille. L’enquête de 1899 déclare que l’église S. Philippe a été paroissiale jusqu’en 1600 ; pèlerinage une fois par an, le premier mai avec messe et vêpres. Durant la dernière moitié du XIXe siècle, elle est qualifiée de chapelle rurale. R. Collier en donne une brève description et conclut, cette chapelle, du XVIe ou du XVIIe siècle, se tient dans le droit fil de la tradition romane ; elle peut d’ailleurs avoir conservé certains éléments du Moyen Age : arc triomphal, partie de l’abside (p. 232). Elle est régulièrement entretenue par la Mairie et une association de sauvegarde. Il est possible que le site ait abrité un village au IXe siècle installé sur un habitat antique.


270. Saint-Jean de Barrabine, prieuré de Ganagobie

C’est la seule église citée par les Pouillés de 1350 avec le rector ecclesie de Barrabina et le prior Sancti Johannis de Barrabina (p. 88 et 93). Le prieuré fait partie des biens de l’abbaye de Ganagobie depuis le XIe siècle, période de dons importants faits au monastère. Il côtoie le prieuré Saint-Pierre de Bonafosse, de la même obédience, situé tout près, dans la commune de Barras limitrophe de celle de Mirabeau. Cette dépendance du prieuré Saint-Jean de Barrabine à Ganagobie est attestée par Abbayes et Prieurés (p. 53) et confirmée par G. Barruol (2). L’église Saint-Jean est l’église paroissiale du territoire qui s’étend au nord du village de Mirabeau et qui d’ailleurs constitue la section A du cadastre napoléonien de 1824, section dite la Paroisse. Aujourd’hui elle n’existe plus, mais on peut la situer sur la rive gauche du Ravin de Barrabine au nord du hameau de Garce, d’après la carte de Cassini qui la figure en état.  Le toponyme St Jean apparaît également sur les cartes actuelles. C’est dans ce secteur, aux alentours de Garce que sont signalés trois sites ayant livré des tuiles romaines, des céramiques du Haut Empire et des tombes sous tuiles. Le toponyme Vière, Viérard sur le cadastre, pourrait révéler un habitat du IXe siècle selon le découvreur du site (CAG, p. 297). En 1602, l’évêque de Gap en visite nomme à Mirabeau, église Saint-Jean de Barrabine, mais elle est citée en même temps qu’une autre que nous verrons par la suite. Elle va devenir simple chapelle quand sera établie une église paroissiale dans le village. Au XIXe siècle, elle fait partie des chapelles rurales. Elle figure sur le cadastre napoléonien, section A 1, parcelle 123 au quartier St Jean. En 1860, on apprend qu’elle a besoin de réparations, puis elle disparaît des documents.

271. Notre-Dame des Grenouillières

Cette église isolée est située 400 mètres sur une colline élevée au sud du village et a dû être construite au cours du XVIe siècle, plus proche des hameaux les plus importants que Saint-Jean de Barrabine au nord. En 1602, l’église toute ouverte, sans porte et descouverte.  En 1612, l’évêque en visite la trouve non rebastie, elle est sous le titre de Notre-Dame. En 1687, l’église est dite église sous le titre de saint Jean-Baptiste, autrefois Notre Dame des Grenouillières (ADHA G 780, 781 et 786). D’abord sous la titulature de Notre-Dame, l’église va devenir paroissiale au moment où celle de Saint-Jean est abandonnée au XVIIe siècle. C’est pourquoi, elle prend le titre de Saint-Jean-Baptiste, récupérant précieusement la titulature de la première paroisse. Elle ne va pas rester longtemps paroissiale, car en 1712, l’évêque remarque une chapelle dans le village du Riou, tout près de la maison du sieur curé, sous le vocable de Notre-Dame du Bon Secours, asses bien bâtie, qui a environ 20 toises de longueur sur environ 3 largeur, où il y a une tribune, et il nous a paru qu’on pourroit en faire une église paroissiale bien décente et honnête (G 799). L’église Notre-Dame est alors abandonnée au cours du XIXe siècle au profit d’une nouvelle paroisse, cette fois-ci dans le village qui s’étoffe de plus en plus. R. Collier décrit l’église Notre-Dame ainsi : assez grande, l’église devait avoir une nef de trois travées ; il n’en subsiste que des pans de murs, le clocher, la travée de chœur. Celle-ci est voûtée sur croisées d’ogive ; les nervures sont formées de deux gros boudins se croisant en leur centre et reposant sur de petits culots. Le clocher, de section carrée, d’un seul bloc, est percé de fenêtres hautes, étroite, en plein cintre. Le tout, datant sans doute du XVIe siècle, d’un appareil solide, compact, se détache en masse nette haut sur le ciel, tout au sommet d’un coteau solitaire et nu (p. 172).

272. Chapelle Notre-Dame du Bon Secours

Elle n’est citée que le 1er octobre 1761, à Mirabeau, chapelle presbytérale Notre Dame du Bon Secours (ADHA G 780). Edifiée sans doute au siècle précédent près du presbytère, son statut est confirmé par l’abbé Féraud, une chapelle sise dans le village, est affectée dans la semaine au service paroissial ; son titre est celui de Notre-Dame-de-Bon-Secours (p. 180). En 1865, elle est toujours chapelle de secours. C’est un peu avant la fin de ce siècle qu’elle va devenir définitivement paroissiale.

Synthèse

Il apparaît que l’organisation en villae issue de l’Antiquité et du haut Moyen Age ait perdurée jusqu’à l’époque moderne quand on constate les multiples hameaux et fermes isolées. Il est rare d’autre part de rencontrer plusieurs églises paroissiales sur le même territoire, sans que l’une soit succursale de l’autre. Saint-Philippe et Saint-Jean sont indépendantes auxquelles va s’ajouter pendant un temps Notre-Dame des Grenouillères. Ce n’est qu’à la fin du XIXe siècle qu’une seule église sera déclarée paroissiale, rentrant alors dans la norme de l’organisation ecclésiastique en vigueur dans tous les diocèses de France.


1. 1079 4 juin (CSV II, n° 843, p. 218). 1113 23 avril (II, n° 848, p. 238). 1135 18 juin (II, n° 844, p. 226). 

2. Collectif, Ganagobie, mille ans d’un monastère en Provence, Les Alpes de Lumière, n° 120-121, p. 31.

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