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Faisait partie du diocèse de Riez et de la viguerie de Moustiers, aujourd’hui dans le canton de Valensole. Cette vaste commune de 6946 hectares est située dans la partie sud-ouest du plateau de Valensole, bordée à l’ouest par la Durance et traversée par le Verdon. Elle a connu une occupation humaine dès la Préhistoire et la Protohistoire, mais surtout à l’époque romaine grâce à ses eaux thermales (CAG n° 094, p. 215-225). La période du Moyen Age est également bien représentée, 100 feux, soit 500 habitants en 1315 avec une population qui dépasse les 1000 habitants aujourd’hui. Le territoire va connaître trois communautés, celles de Gréoux, du Rousset et d’Aurafrède. Elles apparaissent dans les Pouillés de 1274 avec le capellanus de Gresolis et  le prior de Gresolis, le prior de Rosseto et le prior ecclesie Beate Marie de Aurafrigida ; auxquels il faut ajouter l’Hospitalarius de Gresolis (Pouillés, p. 105 à 108).

Après la mention de Nymphis Griselicis à l’époque romaine, Gréoux réapparaît, selon les auteurs, en 1096 quand l’évêque de Riez Augier fait don à l’abbaye de Montmajour de l’église Saint-Pierre (1). Le texte, reproduit par GCN I (Inst. Riez n° XI, col. 371-372) ne mentionne pas Gréoux. On ne sait à quelle date, le prieuré aurait été cédé aux Templiers, puis à la suppression de l’ordre il serait revenu au chapitre de Riez. Ici encore, on ne possède aucune trace des Templiers, seulement une mention, à la fin du XIIIe siècle, d’une dépendance de l’ordre de Saint-Jean-de-Jérusalem (2). Autre difficulté, le prieuré serait dédié à Notre-Dame-des-Ormeaux qui, en fait, est la titulature de l’église paroissiale dans le village, alors que le prieuré est dédié à saint Pierre et est hors la ville. C’est ce que confirme la CAG, église Saint-Pierre-hors-les-murs ou Saint-Pierre-lez-Gréoux dans le quartier antique.

199. Le prieuré Saint-Pierre

Il était en effet situé dans le quartier antique où s’élevaient les thermes romains, à l’est du village et au sud de la route de Riez. Aujourd’hui, il est complètement détruit et ne paraît même pas sur la carte de Cassini. Nicolas Fabry, sieur de Peyresq, découvrit au XVIIe siècle un fragment d’un autel antique incorporé à l’autel de l’église. Ce qui laisse supposer que l’église du prieuré a été construite à l’emplacement d’un temple antique. L’inscription gravée dans la pierre révèle une dédicace dédiée aux divinités de la source thermale, les Nymphis Griselicis. Ce fut la première église paroissiale de Gréoux avant que ne se crée le castrum sur la colline et le village au pied. C’est elle qui est citée en 1274 avec le prior de Gresolis, tandis que l’église paroissiale du village est desservie par le capellanus de Gresolis. Ce qui veut dire que Montmajour est seulement en possession du prieuré et que l’église dépend de l’évêque de Riez. Cette dernière présente une origine romane avec de nombreux ajouts postérieurs (Provence Romane, p. 54 et Collier, p. 117-118). La présence d’un ordre templier ou hospitalier pourrait se révéler avec l’Hospitalarius de Gresolis cité en 1274, mais on ne peut en dire plus par manque de documents.

200. Le prieuré d’Aurafrigida ou la chapelle Notre-Dame-des-Œufs, sanctuaire de la fécondité

Le hameau de Aurafrède est situé sur la rive gauche du Verdon en face du village de Gréoux. Les seules citations que l’on connaisse remontent à 1274 avec le prior ecclesie Beate Marie de Aurafrigida, puis en 1351 avec l’ecclesia de Aura Frigida. Peu d’auteurs se sont intéressé à cette chapelle et au site (3). Aurafrède a été un petit fief à part entière, mais dont la durée de vie n’a pas dépassé la fin du XVe siècle, ayant été entièrement dépeuplé. Sur la colline dominant le hameau se dresse une chapelle dédiée à Notre Dame, celle citée en 1274. Elle faisait l’objet d’un pèlerinage particulier. Les jeunes filles en quête de mari, les femmes désirant un enfant, montaient à la chapelle portant des œufs. Elles en déposaient une partie dans des niches entourant l’autel et mangeaient les autres. L’enquête sur les lieux de culte de 1899 précise : chapelle Notre-Dame des Œufs. Messe le 25 mars, le 8 septembre et le lendemain de la première communion. Abandonné juste avant la dernière guerre, le pèlerinage a repris depuis quelques années et la chapelle a été restaurée. La carte de Cassini signale la chapelle et indique l’Hermitage ND, le dernier ermite l’ayant occupé jusqu’en 1883. Les rares auteurs (Bertrand et Bailly) pensent que la chapelle a succédé à un culte païen, occupant le site d’un habitat gallo-romain, ou même a remplacé un sanctuaire de la fécondité de l’époque protohistorique.

201. L’église Saint-Pierre du Rousset

Le castrum du Rousset est cité en 1225 lors de l’hommage prêté par Boniface de Castellane pour plusieurs castra dont celui du Rousset (RACP, n° 104, p. 214). L’église apparaît peu de temps après, en 1274, avec le prior de Rosseto. C’est avec Bartel que nous apprenons qu’elle est dédiée à saint Pierre (p. 62). Rousset est situé à l’extrémité ouest de la commune, non loin de la Durance. L’habitat est dispersé et le site dominant est celui constitué par le château que l’on date du XVe, mais surtout du XVIIe siècle (Collier, p. 260). Il abrite une chapelle qui renferme une belle toile représentant l’Assomption. Dédiée à saint Pierre, ce fut l’église paroissiale d’origine. L’abbé Féraud rapporte qu’au XIXe siècle la paroisse de Rousset comporte une fraction de la commune de Gréoux et une autre de Valensole et que le service paroissial se fait dans la chapelle Sainte-Madeleine près de Villedieu sur la commune de Valensole, la chapelle du château n’étant qu’une chapelle domestique.

202. Chapelle Saint-Sébastien

Elle est située immédiatement au sud du village de Gréoux, non loin de la rive droite du Verdon. Elle figure lors des visites pastorales en 1860, 1866 et en 1872 où on dit qu’on a réparé la chapelle depuis la dernière visite. C’est avec l’abbé Féraud que l’on apprend que saint Sébastien est le patron de la paroisse que l’on célèbre toujours le 20 janvier, avec bravade. C’est ce que confirme l’enquête de 1899 : chapelle Saint Sébastien patron de la paroisse, 4 messes par an. Elle figure sur Cassini et sa fondation peut remonter au XVIe siècle, Sébastien étant un des protecteurs contre les fléaux.

203. Chapelle Sainte-Croix

Elle est citée en même temps que la précédente et est située immédiatement à l’ouest du village. En 1899, on y dit la messe en mai et en septembre. Elle est en état.

204. Chapelle Saint-Martin

Elle était située 1000 mètres au nord du village, au bord de la route conduisant à Valensole (D 8). Elle figure ruinée sur Cassini portant le nom de St Martin le roubina. La CAG signale, aux abords des ruines de la chapelle Saint-Martin, apparaissent de nombreux débris de céramiques romaines et médiévales (p. 223). Encore un édifice religieux sur un site antique avec une titulature à saint Martin significative.

Synthèse

L’église du prieuré Saint-Pierre, élevée à l’emplacement d’un temple antique, paraît être une christianisation précoce d’un lieu païen. Notre-Dame-des-Œufs, si elle a pu servir un temps de paroisse, apparaît comme un sanctuaire lié à la fécondité qui aurait pu succéder à un rite païen. Son isolement sur un sommet, dominant le cours du Verdon et la ville de Gréoux, en fait un haut lieu sacré.

 


(1) C’est l’opinion de Féraud (Souvenirs religieux, p. 51-52). Abbayes et Prieurés (p. 65). Collier, p. 117. Alpes Romanes II, p. 54). Seule la Carte Archéologique est plus prudente pour accepter ces données (p. 216).

(2) R. Collier, s’inspirant de Durbec, « les Templiers en Haute-Provence », Bul. SSL, T XXXVI, 1960, p. 196. Il ajoute que les imposantes ruines de château des Templiers à Gréoux-les-Bains, renoncent à se parer du souvenir sombre et glorieux de l’ordre persécuté par Philippe le Bel, mais les légendes ont la vie dure …

(3) Regis BERTRAND, « Un sanctuaire de la fécondité en Haute-Provence : Notre-Dame des Oeufs », Religion populaire. Le monde alpin et rhodanien, n° 1-4, 1977, p. 173-181. Fernard BENOIT, La Provence et le Comtat Venaissin, Paris, 1949, p. 252. Robert BAILLY, Chapelles de Provence, Horvath, 1988, p. 28-29. Pat. Rel., n° 23, 2000, p. 17-19.

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