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Faisait partie du diocèse de Gap et de la viguerie de Forcalquier, aujourd’hui dans le canton de Sisteron. Le territoire côtoie la Durance sur sa rive gauche et s’enfonce dans un milieu montagneux à l’est du fleuve. Il est composé de trois territoires, celui situé au sud avec le village d’Entrepierres et le prieuré de Vilhosc. Séparé par la Montagne de la Baume et les hauteurs des Rochers de St-Michel (altitude maximum 1248 m), le deuxième, au nord, comprend les hameaux de Mézien et de Naux. Le troisième, à l’est, séparé du premier par le Vançon, forme le terroir de Saint-Symphorien.  L’occupation antique est particulièrement dense, surtout aux abords de la Durance et des vallées du Jabron et du Vançon (CAG, n° 075, p. 173 à 176). Une certaine continuité d’habitat semble avoir perdurée aux alentours de Vilhosc où se remarquent plusieurs témoins d’habitats avec une crypte peut-être paléo chrétienne encore en bon état aujourd’hui dans la ferme du prieuré de Vilhosc. Les premières mentions du vocable Entrepierres datent du début du XIe siècle. C’est à l’occasion de dons faits à l’église de Saint-Geniez dépendante de l’abbaye de Saint-Victor. C’est d’abord, vers 1030, la citation d’un habitant d’Entrepierres, Ermenfredus de Inter Petras. Puis, vers 1040, c’est le don d’une terre qui est subtus in Inter Petras, à las Nogeiras. A la même date c’est le territoire de anti Petras qui est cité. De même courant XIe siècle, Inter Petras (1).

L’étendue du territoire, 4780 hectares, sa diversité géographique compartimentée, vont favoriser l’éclosion de plusieurs communautés et donc d’églises. Vers 1350 et en 1351, on en rencontre trois desservies par des prieurs : prior Sancti Simphoriani, prior de Villosco, prior de Interpetris (Pouillés, p. 88-89 et 93-94). Ces trois communautés vont rester indépendantes et former des communes distinctes jusqu’en 1975 où elles seront réunies pour former une commune unique sous la dénomination d’Entrepierres. En dehors de ces trois églises paroissiales citées au XIVe siècle, il faut en ajouter d’autres qui apparaissent lors de la visite de l’évêque de Gap en 1602. Il cite en effet l’église Saint-Pierre de Naux, une chapelle Saint-Jean et une église appelée St Puech. En 1687, il en cite une quatrième, l’église Saint-Saturnin de Mézien (2). Pour une meilleure compréhension, nous allons les détailler dans chacune des anciennes communes.


ENTREPIERRES

Si Saint-Victor reçoit quelques dons sur le territoire d’Entrepierres au XIe siècle, il ne semble pas avoir fondé de prieuré. Le premier habitat est perché au-dessus du village actuel, avec une église dédiée à saint Marc. C’est sans doute ce que signale Achard en 1787, on voit aussi les ruines des maisons et d’une église dans le quartier, que l’on nomme Fouerço ; mais on ignore s’il y a eu dans cet endroit un village. Texte recopié par l’abbé Féraud, on voit aussi les ruines de maisons et d’une église dans le quartier du Fouerco, mais on ignore s’il y a eu un village ou hameau dans cet endroit (p. 450). Après avoir compté quelques 100 habitants en 1315, la communauté est déclaré inhabitée en 1472. Elle se relève péniblement au cours des siècles suivants pour atteindre 372 habitants en 1765 puis 452 en 1851. C’est au cours du XVIe, puis du XVIIe siècle, que le village va se former et se doter d’une nouvelle église, reprenant la titulature de la première, saint Marc. Elle est datée communément du XVIIe siècle (Collier, p. 216).

161. L’ancienne église Saint-Saturnin de Mézien

Elle n’est pas citée par l’évêque lors de sa visite en 1602, mais seulement en 1687, sous le titre de saint Saturnin. L’abbé Féraud avoue que la paroisse n’est érigée que depuis fort peu de temps. Il est probable que le même phénomène survenu à Entrepierres se soit répété ici. Un quartier dit l’Eglise signalé par le cadastre napoléonien a révélé les vestiges de l’église paroissiale de Mézien (attestée en 1707, peut-être plus ancienne) et d’un  cimetière, et au sud de ceux-ci, des tegulae dispersées et des ruines d’habitations modernes (CAG, p. 176). La nouvelle église de Mézien a dû remplacer la première au XVIIe siècle comme dans le cas d’Entrepierres.

162. La chapelle de Naux

Elle est citée en 1602 sous le titre d’église Saint-Pierre de Naux, voûtée et couverte, ce qui signifie qu’elle n’a pas trop souffert lors des guerres de Religion qui viennent de se terminer, cas assez rare. Elle est encore mentionnée en 1687, mais cette fois-ci comme chapelle située à un quart de lieue. Elle dépend de la paroisse de Mézien et en 1858 elle est qualifiée de chapelle rurale au hameau de Naux. Mr le curé assure que tout est décent (2 V 91).  Elle est encore citée en 1867, 1869, 1873 et lors de l’inventaire de 1906 la chapelle de Naux est en état, meublée, 50 m². Le village va se vider peu à peu et la chapelle va aller en se dégradant. Aujourd’hui le village est inhabité. Il est difficile de connaître la naissance du village et de l’église, mais l’existence de cette dernière en 1602 laisse envisager une fondation au début du XVIe siècle, les guerres de Religion depuis le milieu de ce siècle n’ayant pas favorisé une telle entreprise. Ces dernières années la chapelle a été entièrement restaurée.

163. L’église Saint-Puech

Le site de Saint-Puy est situé complètement à l’extrémité ouest de la commune sur une terrasse en bordure de la Durance et de la voie  antique Digne/Sisteron. On y a découvert des tombeaux antiques. C’est Achard qui, le premier, relate que l’on trouve les débris d’une maison de Templiers sur la route de Volonne à Sisteron, au quartier du S. Puits. Féraud lui emboite le pas : on trouve au quartier du Saint-Puits les débris d’un ancien monastère qu’on attribue aux Templiers. Maison ou monastère des Templiers, il existait en effet une église, elle est citée en 1602 : église appelée St Puech, toute découverte. Ici, les guerres de Religion ne l’ont pas laissé en état et il semble que rien n’ait été fait par la suite pour la redresser. Elle ne réapparaît plus dans aucun texte. Le vocable évoque une colline sur laquelle est bâti un sanctuaire. Dominant la Durance et une voie importante, sur un site antique, la colline a pu abriter à l’époque romaine un petit temple, un fanum, christianisé par la suite (CAG, p. 173).

164. La chapelle Saint-Jean aux Andrieux

En 1602 est citée une chapelle Saint-Jean toute découverte. Ce n’est qu’en 1687 que l’on en apprend un peu plus : à Mézien, loin de l’église Saint-Saturnin, au hameau des Andreux, il y a la chapelle Saint-Jean. Détruite lors des guerres de Religion, elle semble avoir été réparée dans le courant du XVIIe siècle. Mais les archives n’en disent pas plus, elle n’apparaît pas lors des visites du XIXe siècle et semble avoir complètement disparu.


SAINT-SYMPHORIEN

Cette ancienne commune occupait 1484 hectares à l’est d’Entrepierres, arrosée par le Vançon. Elle est citée en 1038 lors de donations faites au prieuré de Saint-Geniez par un certain Arnaldus presbiter de Sanctus Simphorianus qui fait un don du lieu qu’on appelle Claperio. Puis, Umbertus de Sancto Simphoriano, son fils Pierre font un don de leur héritage d’un champ appellé Clapera (CSV 2, n° 721, p. 67).

165. La Tour, l’église et le castrum de Saint-Symphorien

A l’est du village s’élève une colline dite côteau de la Tour par le cadastre napoléonien de 1814. C’est là que s’élevait le premier village avec son église et le château. Ce dernier est cité plusieurs fois au cours du XIIIe siècle, castrum Sancti Simphoriani (RACP, n° 165, 275, 375). On a reconnu plus haut que l’église était desservie par un prieur au XIVe siècle. Elle dépendait de la prévôté de Chardavon. La population, pendant cette période, est prospère avec 68 feux en 1315, soit près de 350 habitants. En 1471, le territoire est déclaré inhabité. Les bandes de Raymond de Turenne sont passé par là en 1392 et ont détruit le château et le village. C’est au début du XVIe siècle que le village actuel va se constituer, au pied de la colline de la Tour, avec une nouvelle église qui reprend, comme à l’accoutumée, la titulature de la première. La population va atteindre son maximum avec 225 habitants en 1865, mais l’exode commence déjà, 180 habitants en 1851, pour aboutir à 2 personnes en 1962 (Atlas, p. 198). Aujourd’hui, le village est abandonné.


VILHOSC

L’occupation gallo-romaine semble avoir laissé son empreinte, non seulement sur le terrain, mais également dans le nom de Vilhosc. Celui-ci est en effet formé d’un gentilice latin, Villius, auquel a été adjoint le suffixe gaulois -sc-, pour former le nom d’un domaine gallo-romain, Villioscum (Rostaing, p. 350-351). D’autre part, lors des deux premières citations du XIe siècle, il est précédé du terme villa, vocable faisant référence à une exploitation domaniale de l’époque carolingienne. Il semblerait que l’on soit en présence à Vilhosc d’une occupation pérenne concrétisée par une église présentant une crypte rapellant l’époque paléochrétienne.

Vilhosc apparaît donc au XIe siècle dans les mêmes conditions qu’Entrepierres et Saint-Symphorien, à l’occasion de donations faites au prieuré de Saint-Geniez. C’est d’abord en 1038 où est cité le territorium ville Viliosco, puis vers 1040 avec le don d’une vigne qui est in territorio de villa que nominant Vilosco, que est in loco quem nominant Lars (CSV 2, n° 719, p. 65 et n° 728, p. 70). L’église est desservie par un prieur comme on l’a vu plus haut et elle dépend de la communauté de Chardavon. Elle est sous le patronage des saints Gervais et Protais. En 1602, l’évêque de Gap la trouve seulement avec les quatre murailles, c’est-à-dire sans voûte ni toiture. Revenant quinze ans plus tard, il demande qu’elle soit bientôt finie. D’après l’abbé Féraud on la fait remonter au XIIe siècle.

166. Le prieuré Saint-Gervais de Vilhosc

Ce prieuré a fait l’objet de plusieurs articles par la qualité de son architecture (3). Classé Monument Historique, il ne reste de l’édifice primitif que la crypte surmontée des bâtiments d’une ferme ayant remplacé l’église. Les auteurs divergent sur les dates de construction. Si une partie de la crypte située à l’est est datable des Xe-XIe siècles, il faudrait dater pour certains l’autre partie des Ve-VIe siècles. Le site du prieuré recèle en outre de nombreux éléments révèlant une occupation gallo-romaine, monnaies, tegulae, poteries, ainsi que des sépultures de type indéterminé. Il est probable que l’édifice a servi d’église paroissiale durant la période du Moyen Age avant la construction d’une église à Vilhosc même. C’est ce qui apparaît lors de la visite de l’évêque en 1602 où les consuls font remarquer que les paroissiens allaient autrefois en procession à l’église Saint-Gervais pour assister à la messe le dimanche qui suit la fête de Pâques. Ils font remarquer également que le cimetière attenant renferme bon nombre de morts enterrés.


Synthèse

On constate le déperchement, c’est-à-dire l’abandon de l’habitat perché et fortifié à Entrepierrres avec le site de Fouerco, à Mézien avec le site de l’Eglise et à Saint-Symphorien avec la Tour. Les guerres et la peste du XIVe siècle ont été particulièrement meurtrières dans ces communautés.Il faut mettre à part l’église de Saint-Puech. Sur un site antique et aux abords d’une voie également antique, il a pu succéder à un établissement romain. Enfin le prieuré de Vilhosc présente des caractéristiques qui peuvent le faire remonter au moins à la période carolingienne. Son implantation sur un site antique indique une perennité d’occupation.


(1) CSV, II, vers 1030 (n° 714, p. 60) ;  vers 1040 (n° 723, p. 68) ; vers 1040 (n° 724, p. 68) ; XIe (n° 729, p. 71).  

(2) Visite de 1602, ADHA G 780, visite de 1687, G 786.

(3) Provence romane 2, p. 92-93. Alpes romanes, p. 239 à 243. R. Collier, p. 50-52. Bailly, p. 47. Carte Archéologique, p. 174.

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